Odile MAURIN

Dessin de couverture de la tribune du monde avec 2 mains et une personne e nfauteuil roulant qui passe de main en main
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Par Odile MAURIN

Tribune : « Nous, personnes handicapées, devons entrer pleinement dans la représentation politique » par Audrey Henocque et Odile Maurin

Les candidates et les candidats à l’élection présidentielle et aux législatives doivent s’engager à créer un droit et des moyens réels pour la compensation du handicap dans la vie politique soulignent, dans une tribune au « Monde », Audrey Hénocque, première adjointe au maire de Lyon, et Odile Maurin, conseillère municipale et métropolitaine à Toulouse.

Le Monde
Audrey Henocque
Odile Maurin

Publiée par le Monde le 2 mars 2022

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/02/nous-personnes-handicapees-devons-entrer-pleinement-dans-la-representation-politique_6115843_3232.html?fbclid=IwAR1t6vU4TcREts6ygvJdqBQbaliQFSYNdUgtveG6uWtMAtDZbRmzocka3m4

Tribune. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), nous, personnes handicapées, représentons 15 % de la population. Pourtant nous sommes encore trop rares parmi les élues et élus de la République.

A la veille des élections présidentielle et législatives, certains partis politiques semblent s’émouvoir de ce décalage indécent entre leur propre représentativité et le nombre réel de personnes handicapées dans notre société. Ils essaient de chercher des candidates et candidats correspondant à cette définition et ont du mal à en trouver. Et pour cause !

Pouvoir mener campagne

Nous n’évoquerons pas ici l’ensemble des nombreux freins qui limitent notre accès à la vie publique et politique telles que les représentations négatives, l’absence d’accessibilité des espaces publics, des transports, et du bâti.

Nous demandons aujourd’hui une mesure simple à mettre en œuvre par un gouvernement qui en aurait la volonté : mettre en place les aménagements techniques, organisationnels et humains suffisants, quelle que soit la situation de handicap, afin de nous permettre de mener campagne et d’exercer pleinement notre mandat.

En effet, nous, élues en situation de handicap, demandons que le code général des collectivités locales et les réglementations régissant les mandats nationaux soient complétés et précisés pour intégrer ce droit à compensation du handicap dans la participation à la vie politique.

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Dans le champ professionnel, il est reconnu depuis de nombreuses années que l’égal accès à l’emploi des personnes handicapées nécessite la compensation de leur handicap et l’aménagement du poste de travail. Depuis 2005, la loi définit la notion « d’aménagement raisonnable » reposant notamment sur des moyens humains ou des aides techniques, l’aménagement du véhicule ou de l’espace de travail.

Or, quasiment aucune mesure de compensation du handicap et de mise en accessibilité n’existe pour que les personnes en ayant besoin puissent même envisager de s’engager dans la vie politique, faire campagne et exercer un mandat avec les mêmes chances que toutes et tous.

Financement par un fonds national

Pourtant, aucune différence physique, sensorielle, mentale, cognitive ou psychologique ne devrait – en France, en 2022 – nous empêcher, nous citoyens et citoyennes en situation de handicap, de nous présenter à des élections pour y porter des idées qui sont tout aussi légitimes que celles des candidats valides.

Cette compensation doit être adaptée et proportionnée aux besoins de la personne. Il peut s’agir, selon les situations, de la mise à disposition d’une assistance humaine pour préparer puis participer aux diverses réunions et activités liées au mandat ou pour se déplacer. Cela peut nécessiter la mise en accessibilité et l’aménagement des bâtiments des institutions représentatives et notamment des principaux lieux d’exercice du mandat.

Lire la tribune : « La prise en compte du handicap est un enjeu de justice sociale qui concerne toute la société »

Enfin, pour les handicaps visuels ou auditifs, il est parfois indispensable de disposer de la transcription en braille ou en format lisible par des lecteurs d’écran des documents préparatoires et officiels ou d’interprète en langue des signes ou encore d’autres solutions pour tous les échanges nécessaires à la campagne et au mandat.

Le coût de ces aménagements et assistances techniques et humaines ne doit peser ni sur les candidats ni sur les partis politiques pendant les campagnes électorales, ni sur les collectivités pendant l’exercice du mandat – au risque d’inciter ces institutions à écarter les candidates et candidats et élues et élus en situation de handicap. Un fonds national doit en assurer le financement, avec des prises en charge adaptées à la réalité des besoins.

La France dénoncée par l’ONU

Tout comme nos homologues valides, nous avons des compétences et des convictions sur l’ensemble des problématiques qui ont trait au bon fonctionnement économique, social et démocratique de notre société.

Notre participation aux décisions locales et nationales est une garantie que notre parole – y compris dans notre identité de personnes confrontées à une société inadaptée et inhospitalière – soit prise en compte. Au même titre que la représentation politique doit être paritaire pour que la voix des femmes pèse tout autant que celle des hommes, nous devons désormais pouvoir pleinement entrer dans le champ politique.

L’exclusion, par absence des moyens de compensation précités, des personnes handicapées de la vie politique explique en grande partie l’absence quasi totale dans les programmes électoraux 2022 de la question du droit à l’accessibilité et à la vie autonome. La représentation des personnes handicapées est aujourd’hui confisquée, notamment par les organisations gestionnaires d’établissements qui ont intérêt à la perpétuation du système actuel de ségrégation.

Lire aussi  « Le fait d’être en situation de handicap multiplie par trois le risque de discrimination au travail »

Représentation par nous-mêmes, accessibilité et vie hors institution sont pourtant des droits humains fondamentaux – comme le rappelle le comité des droits des personnes handicapées de l’Organisations des Nations unies, qui a une nouvelle fois dénoncé dans son rapport de septembre 2021 le non-respect par la France de la convention internationale des droits des personnes handicapées. L’effectivité de ces droits ne peut passer que par notre participation aux décisions et à l’acculturation de l’ensemble des élus et élues aux enjeux de la vie autonome.

Nous demandons donc au président de la République, au gouvernement et à l’ensemble des candidates et candidats à l’élection présidentielle et aux législatives de s’engager à créer un droit et des moyens réels pour la compensation du handicap dans la vie politique.

Audrey Hénocque est tétraplégique ; Odile Maurin est autiste et se déplace en fauteuil roulant électrique du fait d’une maladie génétique rare.

Audrey Hénocque (Première adjointe au maire de Lyon, en charge des finances, de la commande publique et des grands évènements) et Odile Maurin (Conseillère municipale et métropolitaine à Toulouse, conseillère au Conseil économique, social et environnemental régional d’Occitanie et présidente d’Handi-Social)

Cliquer pour télécharger le texte de la tribune

Suites médias :

3 mars 22 :

Lyon Capitale : Lyon : les personnes handicapées encore trop peu présentes dans la vie politique

https://www.lyoncapitale.fr/actualite/lyon-les-personnes-handicapees-encore-trop-peu-presentes-dans-la-vie-politique

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